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Piratage : une alternative légale appropriée enraye la progression
Après plusieurs années de progression consécutive, le piratage des contenus audiovisuels a infléchi sa croissance en 2018. Un tournant qui s’explique principalement par le développement des offres légales de vidéos répondant aux attentes du public. Le domaine du sport – et notamment du football – à l’inverse est de plus en plus touché par le piratage. Un phénomène que suit de près Médiamétrie depuis plusieurs années pour le compte de l’ALPA (Association de Lutte contre la Piraterie Audiovisuelle).
Le piratage en baisse
En 2018, la France compte en moyenne 15,4 millions de « pirates » par mois, soit 1 internaute sur 4. Ces internautes se sont connectés au moins une fois à un site dédié à la contrefaçon audiovisuelle sur ordinateur, tablette ou smartphone.
Ce chiffre est en baisse de 19% entre janvier et décembre 2018. Ce recul de la consommation illégale de contenus est corrélé avec la hausse de la pratique légale, particulièrement via les offres de SVoD. En janvier 2018, seuls 16% des consommateurs de vidéos visionnaient leurs programmes exclusivement sur des sites légaux ; ils étaient 35% en décembre, privilégiant ainsi ces solutions aux offres illégales.
Pour Lloyd Mullender, Responsable d’Etudes et de Clientèle à Médiamétrie, « une offre légale qui répond à la demande des utilisateurs a un effet direct de baisse du piratage. Ce n’est pas tant le prix que la simplicité de l’offre, son étendue ou encore la possibilité de stockage qui sont essentiels dans l’adoption de pratiques légales. »
En effet, s’il est important, le prix est loin d’être l’unique motivation au piratage. L’absence d’engagement, la rapidité et l’étendue de l’offre constituent également des facteurs significatifs.
Le pirate : un adepte de contenus
En termes de contenus, les internautes pirates regardent massivement films et séries. Au total 3,8 milliards de pages et 760 millions de vidéos ont été regardées de manière illégale en 2018. Ils s’adonnent à cette pratique très largement sur ordinateur, même si cet écran est en baisse, contrairement au téléphone mobile : en 2018, ils sont quatre fois et demie plus nombreux qu’en 2015 à visionner des contenus illégalement sur leur téléphone.
Pour trouver leurs programmes, près de la moitié des internautes pirates (44%) – soit près de 10 millions de personnes - utilisent le streaming quel que soit l’écran ; il a atteint une audience record en 2018. 3 sur 10 recourent au téléchargement direct et 1 sur 5 au pair-à-pair, tous deux en baisse. Par ailleurs, 8% pratiquent le Live Streaming, en progression sensible en 2018, porté par la consommation des événements sportifs en direct.
Le piratage concerne aujourd’hui tous types de personnes. De manière générale, le pirate est un adepte de contenus qu’il surconsomme par rapport aux autres internautes. Il n’est pas rare qu’il cumule la pratique illégale avec des abonnements à des plateformes de SVoD (27%). Il est également un spectateur plus assidu de films en replay, VoD, cinéma, DVD et TV. De manière générale, les pirates sont des personnes plus jeunes que la population internaute avec une moyenne d’âge de 38 ans, et plutôt de sexe masculin.
En 2018, les deux tiers de la consommation illégale se concentrent sur les 20 premiers sites pirates, sur un total de 1 500 suivis chaque mois dans la mesure d’audience digitale 3 écrans de Médiamétrie. Une part en baisse de 15 points par rapport à 2017, qui s’explique notamment par les actions judiciaires menées par les ayants droits, menant à la fermeture de sites pirates et donc au report partiel de l’audience sur d’autres sites à faible audience.
Le développement du piratage d’événements sportifs
En parallèle de la baisse du piratage de contenus de fiction, nous assistons en France à une augmentation du piratage d’événements sportifs. Principalement, les internautes se tournent vers les plateformes de streaming illégal pour regarder en direct les matchs de football qui sont diffusés via des offres de chaînes TV payantes. Ainsi, la Ligue des Champions est le programme le plus regardé sur les sites de live streaming : elle rassemble en moyenne 677 000 internautes par journée, loin devant la Ligue 1 et la Ligue Europa.
Au-delà du football, les internautes pirates visionnent également la Formule 1 et le rugby sur les sites de streaming illégal. On compte 174 000 visiteurs uniques en moyenne en 2018 pour regarder la Formule 1 de manière illégale et 144 000 pour le Top 14 de Rugby.
Lloyd Mullender analyse : « Les offres de football à la télévision sont en pleine recomposition depuis quelque temps. Les spectateurs ont besoin d’un temps d’adaptation pour recourir à une offre payante. On constate qu’il faut quelques mois pour que les pirates franchissent le pas de l’abonnement. Nous sommes en train d’observer ce phénomène sur le sport ».
Laure Osmanian Molinero
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3 questions à Frédéric Delacroix, Délégué Général de l’ALPA
Pensez-vous que la tendance baissière observée sur le piratage est durable ?
Nous pensons que cette baisse devrait s’accentuer. En effet nous sommes à un moment où les actions judiciaires menées par l’ALPA et ses membres visant à demander le blocage et le déréférencement de nombreux sites pirates doivent aboutir. Nous devrions constater les effets de leurs applications dans les mois à venir et voir une baisse notable du piratage. Par ailleurs nous observons également un basculement d’un certain nombre d’internautes habitués à accéder à des contenus de manière illicite vers l’offre légale.
Quelles actions menez-vous pour lutter contre le piratage audiovisuel ?
Les principales actions menées par l’ALPA sont :
- Des actions pénales menées à l’encontre des administrateurs de sites pirates, comme cela a été le cas par le passé sur des sites emblématiques comme Zone-téléchargement et T411. Nous continuons ce type d’action lorsque cela est possible.
- Des actions civiles au support des ayants droit en application de l’article L 336-2 du code de la propriété intellectuelle visant à demander au juge le blocage (par les FAI) et le déréférencement (par les moteurs de recherches) des sites pirates. La jurisprudence récente en la matière nous a permis d’engager des actions à l’encontre d’une centaine de sites dédiés à la contrefaçon audiovisuelle et cinématographique sur tous les protocoles.
Quels sont les challenges posés par le domaine du sport ?
Le piratage des contenus sportifs représente 8 % des usages pirates. Il y a quelques mois l’ALPA a engagé des actions pénales à l’encontre des administrateurs des plus gros sites de live streaming. Elles sont en cours et d’autres vont être initiées prochainement.
Le plus grand enjeu pour le sport est l’instantanéité de la suppression de l’accès aux serveurs diffusant des contenus sportifs. C’est un sujet complexe qui passe obligatoirement par la collaboration active des FAI, des moteurs de recherches et des réseaux sociaux.
Mais la lutte contre ce type de piratage passe avant tout par la suppression de l’accès aux sites « vitrines » qui redirigent vers la diffusion illicite de programmes sportifs en en demandant le blocage et le déréférencement. Il serait peut-être nécessaire pour cela de clarifier les droits des ayants droit du sport afin qu’ils puissent bénéficier de possibilités d’agir eux-mêmes directement devant le juge pour demander le blocage et le déréférencement des sites de live-streaming dédiés au sport.
Un autre défi est la lutte contre le piratage IPTV. Son usage pourrait prendre de l’ampleur en France.
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