L’Inde, un marché TV de plus en plus « glocal »

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Marché immense et en pleine évolution, l’Inde constitue un territoire très attractif sur le plan audiovisuel. Il s’est d’ailleurs appuyé sur l'expertise de Médiamétrie pour la mesure d'audience lancée il y a quatre ans. La production locale, très forte, laisse toutefois une place aux divertissements inspirés de formats internationaux. De même, les plateformes de contenus audiovisuels se développent avec des acteurs locaux aux côtés des géants américains. Analyse de la production de ce marché grâce à l’étude NoTA d’Eurodata TV Worldwide.

Un marché immense et complexe

Grâce à la croissance rapide de son économie, sa population nombreuse et sa classe moyenne émergente, l’Inde est un marché très attractif. Avec plus de 830 millions de téléspectateurs potentiels et plus de 150 millions de foyers, l’Inde constitue le deuxième marché TV mondial.

Pour Henri Vilmain, Chargé d'Etudes et de Clientèle chez Eurodata TV Worldwide, « Le paysage audiovisuel indien est complexe en raison de disparités régionales et linguistiques. C’est un marché où l’on recense encore un unique écran de TV par foyer mais dans lequel l’émergence du smartphone commence à faire évoluer les usages. »

D’après le BARC, qui mesure l’audience de la télévision en Inde, la durée d’écoute moyenne de la télévision est de 2h32 par jour et par personne, en augmentation de 9 minutes en un an.

Le paysage télévisuel indien, entre fictions locales et formats internationaux

Les séries de fiction sont majoritaires en Inde : en effet, en analysant les nouveaux lancements de programmes sur les 8 chaînes principales du pays au cours des 4 dernières années, ce genre représente près de 75% des nouveaux programmes. Le « feuilleton quotidien » est omniprésent sur les écrans : la production de ces épisodes se fait en continu et peut prendre jusqu’à plusieurs années.

C’est également la fiction qui culmine en tête des palmarès TV chaque année en Inde, qu’il s’agisse de films ou de séries. La série fantastique « Naagin », lancée en 2015, figure dans le top 10 des meilleures séries depuis sa sortie. Ce hit raconte l’histoire de Shivanya, un serpent ayant la capacité de changer de forme à souhait. La série est dirigée par Ekta Kapoor, considérée comme la papesse du soap opera indien.

De manière générale, le marché indien est constitué essentiellement de productions locales, dont une faible proportion est vouée à l’export international. On observe cependant des acquisitions de séries indiennes en Amérique Latine ou en Europe de l’Est et ce plus particulièrement en Roumanie. Ce pays est connu pour être friand en soap operas de son voisin turc et commence à s’ouvrir aux soaps indiens, avec par exemple en 2018 le lancement de « Swaragini – Jodein Rishton Ke Sur » (Beyond Us) et « Aur Pyaar Ho Gaya » (The Time of Innocence) toutes deux sur la chaîne Pro 2.

Le divertissement n’est pas en reste. Les adaptations de formats internationaux sont populaires et constituent de beaux succès d’audience : un épisode du format de Fremantle « India’s Got Talent » se place parmi les 3 meilleures performances de programmes de divertissement en 2018. D’autres formats internationaux sont bien ancrés dans le paysage audiovisuel depuis de nombreuses années comme « Bigg Boss » qui est l’adaptation locale de « Big Brother » dont la douzième saison est en cours de diffusion. L’adaptation de « Who Wants To Be A Billionaire ? » qui en est à sa dixième saison, continue année après année à réaliser de belles performances d’audience grâce à son animateur Amitabh Bachchan, une véritable superstar locale.

Les programmes de divertissement de type « talent quest » ont le vent en poupe ces dernières années, et plus particulièrement ceux qui mettent en avant la danse. En 2018, ce ne sont pas moins de 3 de ces programmes qui culminent au top 10 des meilleurs divertissements avec « Dance Deewane », « Super Dancer » et « Dance Plus ». Ces trois programmes sont des formats dont les concepts ont été développés localement.

La bataille des plateformes online : une percée américaine parmi les acteurs locaux

Le paysage télévisuel indien est très fragmenté avec 5 groupes médias qui dominent le marché : Star India, Zee Media, Sun TV Network, Sony et Viacom. Ces acteurs ont pour la plupart lancé leur propre plateforme de contenu en ligne. HotStar, la plateforme du groupe Star India, est le leader du marché des plateformes OTT en Inde. Grâce à son vaste catalogue et à son modèle freemium permettant de consulter gratuitement une partie des programmes disponibles, HotStar permet également à ses utilisateurs de bénéficier de tous les programmes sport du groupe comme la ligue nationale de cricket ou bien la Premier League anglaise.

Ces acteurs locaux ne sont pas les seuls dans la bataille des plateformes online. Les deux géants américains des services de vidéos en ligne Amazon et Netflix ont très vite mesuré le potentiel de ce marché. C’est ainsi que Netflix s’y est implanté début 2016, une dizaine de mois seulement avant son concurrent. Les deux acteurs ont compris la nécessité de s’adapter au marché indien en proposant des films et des séries dans les langues du pays. Amazon Prime Video a cependant une longueur d’avance sur Netflix grâce à un catalogue de productions locales plus vaste, proposant notamment des films Hindi. Les deux services investissent massivement dans des productions originales indiennes pour capter davantage l’audience indienne connectée. Netflix développe une stratégie propre à ce marché avec de forts investissements dans des productions originales à vocation internationale : par exemple « Sacred Games », une série policière en 8 épisodes lancée durant l’été 2018 à l’international pour laquelle une deuxième saison a déjà été annoncée. La série explore le crime organisé et la corruption à Mumbai en opposant un super flic au plus grand gangster de la ville.

Pour pénétrer le marché hautement concurrentiel des plateformes online en Inde, Netflix doit faire face à un enjeu majeur : le prix de son abonnement. L’Inde est un marché où les offres de bouquet de Pay TV et aux autres plateformes SVOD, y compris Amazon Prime, sont abordables par le plus grand nombre. Or l’abonnement à Netflix est nettement plus élevé que ceux de ses concurrents, ce qui freine le géant américain dans son acquisition d’abonnés.

Henri Vilmain conclut : « L’Inde est donc de plus en plus attractive pour les acteurs internationaux qui y voient une terre d’opportunités quand bien même les challenges y sont considérables. La taille de ce marché implique des investissements en conséquence : les acteurs locaux sont bien installés, même si les usages évoluent avec le développement des plateformes en ligne et une utilisation toujours plus importante des écrans mobiles. »

La première mesure d’audience interprofessionnelle de la télévision en Inde

En février 2014, le BARC (Broadcast Audience Research Council) – le Joint Industry Commitee nouvellement créé pour développer une mesure d’audience interprofessionnelle de la télévision en Inde - a choisi de faire appel à Médiamétrie pour l’accompagner dans la mise en place de son système de mesure d’audience de la télévision. 

Le souhait du BARC était d’utiliser le système audimétrique de Médiamétrie, tout en fabriquant directement ses propres audimètres en Inde.

L’accompagnement proposé par Médiamétrie a donc consisté à apporter une assistance technique et un transfert de savoir-faire au BARC pour leur permettre de fabriquer en Inde la version courante -TVM2- de l’audimètre de Médiamétrie. 

Médiamétrie a également fourni au BARC ses services d’ingénierie et de formation pour la fourniture, le déploiement et la prise en main de son système logiciel de collecte et de validation des données audimétriques recueillies dans les foyers.

Dès le contrat signé début 2014, le BARC, assisté par Médiamétrie, a commencé à faire fabriquer ses premiers prototypes d’audimètres. En parallèle, Médiamétrie a accompagné le BARC pour le développement de son data center destiné à collecter et valider les données des audimètres recueillies dans les foyers. Avant la fin 2014, les prototypes de l’audimètre étaient approuvés et le système de collecte et validation des données mis en place ; le BARC a ainsi pu lancer la production des audimètres et leur déploiement chez les panélistes.

En avril 2015, le BARC a démarré la mesure avec un panel de plus de 10 000 foyers. Pour la première fois un Inde, dès fin 2015, la taille du panel permettait d’accéder à une analyse des audiences par marchés linguistiques et géographiques et connaître la consommation TV dans la ruralité. Le nombre d’audimètres a progressivement augmenté et en mars 2019 le BARC opérait sa mesure avec 45 000 audimètres installés dans 40 000 foyers indiens.

Pour Gwilherm Nicolas, M.D. Metricline Business Unit de Médiamétrie et qui coordonne ce projet depuis ses débuts, « ce partenariat consacre la grande qualité de conception et d’adaptation des systèmes audimétriques de Médiamétrie ainsi que les capacités de Médiamétrie à accompagner un client international utilisateur de ses technologies ».

 

Laure Osmanian Molinero

 

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