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Les territoires d'Outre-mer : une passion pour l'info
Un genre de programmes en particulier attire leur attention : l’information. A la fois axée sur l’actualité de la métropole et les informations de proximité, elle tient une place de tout premier plan dans leurs pratiques médias. Focus sur l’info à travers les études d’audience (Métridom et études complémentaires) de Médiamétrie.
Les Ultramarins adeptes de médias, avec des nuances par territoire
A Médiamétrie, on scrute l’Outre-mer, sous l’angle des médias bien sûr : mesures d’audience TV et radio et Observatoire des usages digitaux suivent les évolutions des pratiques médias dans ces territoires, avec leurs particularités mais aussi leurs similitudes avec la métropole. Guy Détrousselle, directeur du pôle local de Médiamétrie, précise : « les études d’audience, plurimedia, menées par Médiamétrie sur les territoires ultramarins ont un rôle tout à fait comparable à ce que nous réalisons au quotidien en métropole : à la fois une vision éditoriale avec l’analyse des performances de supports, des profils des téléspectateurs, auditeurs, en fonction des tranches horaires et programmes associés, mais aussi bien entendu un rôle fondamental sur le marché publicitaire - local et extra-local - pour apporter un regard neutre et objectif, régulateur des investissements publicitaires des annonceurs, via les agences et régies. »
Au total les études menées par Médiamétrie couvrent plus de 2 millions de personnes, réparties aux quatre coins de la planète : les Caraïbes - Antilles et Guyane -, l’Océan Indien - La Réunion et Mayotte - et l’Océan Pacifique - Polynésie française et Nouvelle-Calédonie.
Dans les territoires étudiés, plus de 9 Ultramarins sur 10 possèdent un téléviseur (94%). Et chaque jour, on compte en moyenne plus de 1,7 million de téléspectateurs de 13 ans et plus, soit 8 personnes sur 10. Toutefois les pratiques diffèrent selon les territoires. Aux deux extrêmes, on trouve Mayotte où plus de 9 personnes sur 10 regardent la télévision chaque jour, et la Polynésie française, où ils sont 7 sur 10.
En ce qui concerne la radio, elle rassemble plus d’1,5 million d’auditeurs quotidiens en moyenne dans les territoires Outre-mer. Là encore, les pratiques sont très fortement contrastées. Si on compte une forte proportion d’auditeurs radio dans les populations martiniquaise et guadeloupéenne (plus de 80% d’audience cumulée), on en compte un peu plus d’1 sur 2 en Polynésie française. Cependant, de manière générale, les durées d’écoute par auditeur de la radio sont élevées : entre 2h51 par jour à Mayotte – l’équivalent de la Métropole – et jusqu’à 4h23 en Guadeloupe.
Quant à Internet, son usage s’est largement répandu : on compte notamment ¾ d’internautes1 s’étant connectés au cours du dernier mois dans les Caraïbes et à La Réunion.
La prédominance des chaînes généralistes
Outre-mer, les chaînes de télévision généralistes2occupent une place prééminente. Elles rassemblent près d’1,4 million de téléspectateurs au quotidien dans les territoires étudiés. Si l’on ajoute les chaînes d’information3 ce chiffre s’élève à 1,5 million. Ces téléspectateurs regardent en moyenne entre 2 et 3 chaînes par jour, avec une prédilection pour les déclinaisons locales.
Chaînes généralistes et chaînes d’information figurent dans tous les territoires étudiés dans le Top 3 en termes de part d’audience, excepté à La Réunion où les chaînes de sport passent juste devant celles dédiées à l’info. En Guadeloupe et Martinique, les chaînes généralistes représentent respectivement 73% et 75,4% de part d’audience. Et jusqu’à 93,3% en Polynésie française. Les chaînes d’information s’arrogent 6,6% de PDA à Mayotte.
En radio, plus d’1 million d’auditeurs sont à l’écoute des stations généralistes chaque jour. Avec les radios d’information, elles s’imposent en part d’audience, sauf en Polynésie française où les stations musicales sont largement préférées aux autres genres de stations.
L’information : métropole et ultra-local mobilisent le public
Que ce soit à la télévision ou à la radio, en Outre-mer, l’information rassemble un large public. Comme le souligne Nicolas Benoît, expert média et digital ayant exercé de longues années en Outre-mer, « les habitants des territoires d’Outre-mer ont un « besoin » de France très important. Loin de la métropole, ils se sentent souvent un peu abandonnés et loin des préoccupations de l’Hexagone. Ils se tiennent donc au courant de l’actualité et particulièrement de l’actualité sociale et politique ». Il faut dire aussi qu’une communauté importante de personnes originaires des territoires d’Outre-mer habite en métropole.
Et c’est bien la tranche horaire des programmes d’information qui constitue les pics d’audience de la radio et de la télévision.
A la télévision, le pic d’audience des chaînes généralistes et d’information se situe entre 19 heures et 20 heures, soit à l’heure du journal télévisé du soir, et ce quel que soit le territoire observé. En Guadeloupe, les chaînes généralistes et d’information réalisent 90,8% de part d’audience entre 19h et 20h, contre 78,9% sur l’ensemble de la journée ; 195 000 personnes sont devant les chaînes généralistes sur cette tranche horaire. Une part d’audience qui monte à 93,5% en Martinique et près de 200 000 téléspectateurs. A Mayotte, ces mêmes chaînes réalisent 91,7% de PDA. 97,8% en Polynésie française (96,5% sur toute la journée), et 54,5% (49,3% sur l’ensemble de la journée) à La Réunion.
« Le poids de l’information est une parfaite illustration des particularités de l’Outre-mer, avec des pics d’audience au moment des JT et/ou flashs infos » observe Guy Détrousselle. « On peut également parler des Outre-mers, dans la mesure où chaque département, collectivité, territoire a des spécificités sociologiques, démographiques et culturelles. Toutefois sur l’ensemble des territoires étudiés on retrouve des comportements communs avec la révolution digitale et ses impacts directs (multi écrans, différé,…). »
Si le format des journaux d’information est identique à celui de la métropole, leur contenu est composé environ à 85% d’informations nationales et locales et à 15% de l’international concernant leur zone géographique. « Une place importante est accordée à l’info locale et même ultra-locale, à travers des correspondants dans les petites communes qui permettent un maillage fort et complet », précise Nicolas Benoît. Le sentiment de communauté est fort. Il complète : « soumis à des événements climatiques colossaux, aux avant-postes du réchauffement climatique, les Ultramarins sont des gens solidaires face aux catastrophes et s’intéressent à ce qui se passe sur l’ensemble de leur territoire et particulièrement au réchauffement de la planète ».
Sur les stations de radio généralistes, le pic d’audience se situe entre 6h et 7h. Ces stations contribuent majoritairement aux performances de la Radio sur la matinale, et ce sur l’ensemble des territoires à l’exception de la Polynésie française. En effet, nous l’avons vu plus haut, les Polynésiens sont plus adeptes des stations musicales : les généralistes réalisent 27,5% de PDA entre 6h et 7h, c’est toutefois plus que sur l’ensemble de la journée (19,8%). En Guadeloupe, les stations généralistes réalisent 87,3% de PDA sur cette tranche horaire, contre 78,7% sur l’ensemble de la journée4. Elles rassemblent 1,4 million d’auditeurs. Compte tenu du recours important à la voiture, celle-ci constitue le lieu privilégié d’écoute de la radio. L’écoute sur téléphone mobile s’est également fortement développée.
Phénomène récent, l’expert souligne qu’aux côtés des informations essentielles de la vie quotidienne - variations du prix de l’essence par exemple - les journaux d’information consacrent une place croissante aux « success stories » d’ultramarins aux parcours exemplaires en métropole, en Australie ou ailleurs. Mondialisation oblige.
En ce qui concerne la culture, elle tient une place forte dans l’information. L’exception culturelle française est aussi bien vivante en Outre-mer.
Les Ultramarins recherchent aussi l’information sur internet : celle-ci fait d’ailleurs partie des 3 principales activités pratiquées régulièrement sur ce média, et ce quel que soit le support, ordinateur, smartphone ou tablette. Guy Détrousselle relève : « Il existe des sites d’information locale, souvent issus de groupes médias, comme clicanoo, zinfos974 ou linfo.re à La Réunion par exemple… ».
Aux Antilles et en Guyane, 74% des internautes s’étant connectés au cours du dernier mois se sont informés sur l’actualité. Une activité qui se situe en 3ème position derrière l’utilisation de la boîte e-mail (88%) et la recherche sur internet (94%). Les résultats sont très proches à La Réunion où 75,3% des internautes s’informent sur internet, 86,3% utilisent une boite mail, et 95,8% font une recherche sur internet . Les jeunes sont adeptes de l’information sur Internet : aux Antilles et à la Guyane, 71,6% des 13-34 ans consultent l’actualité en ligne et 74% à La Réunion. C’est beaucoup plus que les personnes au-delà de 35 ans, qui sont un peu plus de la moitié à le faire.
Comme le précise Nicolas Benoît, « la recherche d’immédiateté s’effectue désormais prioritairement sur internet ». Les réseaux sociaux jouent un rôle clé pour suivre l’évolution de la météo et particulièrement des cyclones. Ils permettent d’avoir des évaluations de la situation pratiquement en temps réel.
L'expert poursuit : « L'émergence des blogs et réseaux sociaux a notamment contribué à l’arrivée de l’investigation à la télévision et à la radio, sous forme d’émissions d’enquêtes ou bien au sein des journaux d’information. Un genre autrefois peu développé et les médias ultramarins tentent toutefois ce difficile exercice ». Un phénomène également favorisé par la professionnalisation croissante du métier de journaliste en Outre-mer. En effet, on observe un nombre croissant de diplômés d’écoles de journalisme en métropole qui retournent exercer Outre-mer.
L’information a donc de beaux jours devant elle Outre-mer, que ce soit à la télévision, à la radio ou sur internet, médias qui proposent des approches complémentaires. Nicolas Benoît de conclure : « Chaque territoire a une histoire, un patrimoine et des migrations différentes et uniques. Le challenge pour les médias est de parvenir à s’adresser à tous ces territoires et à toutes ces populations. Seules des offres spécifiquement locales sont donc pertinentes ».
3 questions à Luc Laventure, Président du site d’informations Outremers 360°
Comment expliquer la place essentielle de l’information en Outre-mer ?
Il y a trois principales raisons à cela. Tout d’abord l’Outre-mer ce sont des "pays" d’oralité. Par conséquent l’information est constitutive du quotidien. Ensuite, historiquement, la vie républicaine en Outre-mer est faite de débat permanent et la parole revendicatrice a été structurante. Enfin, les territoires sont excentrés par rapport aux lieux de décision et l’information est capitale pour leur survie. C’est pourquoi le foisonnement des médias est tel. A La Réunion par exemple, on compte beaucoup de stations de radios, qui furent parmi les premières à prendre le virage du participatif il y a 30 ans. Les médias sont également structurants dans la vie politique en Guyane et en Guadeloupe, beaucoup plus que dans l'hexagone. En Nouvelle-Calédonie, où le référendum a lieu dans quelques semaines, l'audience de ces médias est en augmentation. Il y a dans ces territoires un besoin permanent d’expression directe. La République se vit au quotidien de façon très forte.
Quelles sont les spécificités de l’information Outre-mer ?
Le trait fondamental est la notion de proximité et l’importance de raconter des histoires. Le rapport à la langue est essentiel. Les écrivains ultramarins sont d’ailleurs essentiels dans la littérature française. Par ailleurs, ces territoires rassemblent des cultures originelles et diverses, ce qui les amène à poser des questions humanistes profondes liées aux questions de races, de religion, de culture, etc. Les débats républicains ont toujours été plus passionnés Outre-mer.
Quelle est la vocation d’Outremers 360° ?
Outremers 360° est né du constat qu’il manquait une vision globale de l’Outre-mer sur le plan national et international. Les régions ultramarines permettent à la France d'être connectée aux cinq continents. Aucun pays ne peut se revendiquer de cette dimension mondiale qui est unique. Outremers 360° est ainsi un média digital transverse, à la fois un des fanions de l’Outre-mer et un diagnostic. Le site s’adresse à toutes les personnes intéressées par l’Outre-mer, via leur activité notamment, qu’elles en proviennent ou non. C’est pourquoi nous proposons des informations fouillées, distanciées sur les plans politique, économique et sociétal. Nous donnons la parole à des experts que l’on n’entend pas par ailleurs. Notre travail et notre légitimité sont maintenant reconnus, et notre mise en perspective des faits d’actualité – la récente démission de Nicolas Hulot par exemple – fait régulièrement l’objet d’un grand partage sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, nous avons développé une politique de partenariats avec nos confrères de la radio et de la TV pour faire encore mieux entendre les voix de l’Outre-mer. Et à ce titre, je tiens à saluer le travail citoyen de l’ensemble des médias de l’Outre-mer, qui créent du lien social.
1 Médiamétrie – OUD (Observatoire des Usages Digitaux) panorama 2017 Antilles-Guyane & Réunion.
2 Chaînes généralistes : principalement les chaînes historiques locales (Outremer la 1ère , Antenne Réunion, Calédonia TV, TNTV …), les chaînes métropolitaines France Télévisions (France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô), les chaînes leader de l’offre élargie en Outre-mer (TF1, M6, Canal+), etc.
3 Chaînes d’information continues telles que BFM TV, CNEWS, LCI, France Info TV, France 24 etc.
4 Médiamétrie - Enquête Métridom Antilles cumul Janvier-Novembre 2017 - Réunion cumul Janvier-Novembre 2017 - Guyane Octobre-Décembre 2017 - Mayotte ad hoc Avril 2017 - Nouvelle Calédonie ad hoc Septembre-Octobre 2017 - Polynésie ad hoc Septembre-Octobre 2017 / cible 13 ans et plus / Pour la TV : Lundi-Vendredi; 00h-24h et pour la Radio Lundi-Vendredi; 05h-24h.
Laure OSMANIAN MOLINERO
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