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Le documentaire à la télévision : quelles évolutions pour quelles audiences ?
Mais quelle en est réellement sa définition ? Difficile d’en trouver une...
Wikipedia présente ce genre comme un programme à vocation informative ou didactique qui utilise généralement des commentaires rétrospectifs et des documents iconographiques authentiques. Dans le cadre de la mesure d’audience de la télévision de Médiamétrie et pour cet article rédigé sous l'impulsion de l'INA pour le E-dossier : « Le documentaire, un genre multiforme », il s’agit d’un programme de stock (hors reportage). Peut être assimilé au documentaire toute émission dans laquelle le documentaire représente la majeure partie de l'émission (par exemple : « Rendez-vous en terre Inconnue », sur France 2) de même que certains « magazines de la vie » sans plateau (par exemple, « Recherche appartement ou maison », sur M6). Ce genre peut également inclure actuellement certains docu-fictions et certaines télé-réalités.
Grâce au documentaire, le petit écran apporte au plus grand nombre un supplément de connaissances et de culture, et offre une ouverture vers les autres. C’est en tout cas la mission que lui avaient confiée les pères fondateurs de la télévision française. En effet, dès ses débuts, la télévision proposait de grandes séries documentaires pédagogiques, comme celles de Daniel Costelle dans les années 1960 - notamment la célèbre série des « Histoires de » la marine, l’aviation, les jeux olympiques…, dont l’œuvre a maintenant rencontré deux générations de téléspectateurs et dont le travail connaît toujours le succès. En témoignent les audiences des six numéros d’« Apocalypse : l’enfer de la seconde guerre mondiale », diffusés sur France 2 en 2009 et qui se placent, dans le Top 10 de l’audience des documentaires, juste derrière les 8 millions de spectateurs de « Home », lesquels avaient valu à Yann Arthus-Bertrand la première place. Fait remarquable, on a pu assister à une progression constante du public d’« Apocalypse » puisque, si le premier volet de la série totalisait 5,4 millions de téléspectateurs, le sixième et dernier culminait avec plus de 7,8 millions de téléspectateurs. En moyenne, les épisodes ont représenté 25,5 % de part d’audience. Et à l’issue des six diffusions, 35,2 % de l’ensemble de la population avait regardé au moins un des six épisodes, soit plus de 20 millions de personnes.
Souvent plébiscité lors des sondages d’opinion, le documentaire est-il encore dans l’ADN des téléspectateurs ? Est-il encore même dans l’ADN des chaînes ?
Elargissement de l’offre et du genre documentaire
Aujourd’hui, ce sont surtout les programmes de télé-réalité qui « font le buzz », au point qu’ils paraissent éclipser le documentaire. Pourtant, sur les six premiers mois de l’année 2013, pour les 13 chaînes gratuites que Médiamétrie mesure quotidiennement, les documentaires représentent 36 heures par jour en moyenne. La part des documentaires dans les programmes est ainsi de 11,7 %. Si l’on réduit le champ de l’analyse aux chaînes historiques (avant l’arrivée des chaînes de la TNT), la proportion des documentaires dans la grille des programmes monte à 19,6 %. Cette proportion a d’ailleurs augmenté de 60 % en cinq ans puisque, sur le même périmètre de chaînes, la part du documentaire n’était que de 12,3 % en 2008. Une progression notamment portée par un élargissement du genre documentaire qui prend actuellement en compte des programmes qui comportent une dimension de divertissement. C’est le cas d’émissions comme « L’Amour est dans le pré » sur M6 ou « Bienvenue chez nous » sur TF1.
Si, pour certaines chaînes, le documentaire arrive à trouver sa place au sein d’une grille généraliste, il en est au moins deux dont ce genre est la colonne vertébrale, puisque Arte et France 5 en diffusent l’écrasante majorité : 61,2 % des documentaires, soit plus de 4 000 heures de programmation, sont diffusés sur ces deux seules chaînes. L’offre existe et continue même à se renforcer avec l’arrivée des chaînes de la TNT HD qui, pour certaines d’entre elles, ont bâti leur grille pour et autour du documentaire. Ainsi HD1, 6ter et RMC Découverte consacrent 32,3 % de leur offre aux documentaires. Sans compter les chaînes thématiques disponibles sur le câble, le satellite et l’ADSL, comme Planète, Ushuaïa TV ou National Géographic Channel, dont le documentaire n’est plus seulement l’ADN mais la raison d’être.
Une consommation qui fonctionne avec l’effet offre
Face à cette offre, comment les téléspectateurs consomment-ils les documentaires ? Sur les six premiers mois de l’année 2013, toujours sur ce périmètre de 13 chaînes, l’ensemble des individus de plus de 4 ans a consommé en moyenne 549 heures de télévision. Ils consacrent en moyenne chacun plus de 33 heures au genre documentaire soit 6 % de leur consommation télévisuelle. Le documentaire se place après la fiction (24,7 %), les magazines (19,0 %), les journaux télévisés (11,3 %) et les jeux (10,4 %), et devant le cinéma à la télévision. Dans un contexte d’hyper-concurrence entre les chaînes, rares sont celles qui offrent au documentaire les faveurs du prime time (première partie de soirée) : seulement 3% de ces 6 600 heures de documentaires sont proposées à une heure de grande écoute et l’offre documentaire, pour ce carrefour, représente 7,7 % de l’ensemble des genres proposés.
Répartition par genre de l’offre de programmes proposés en prime time et sur l’ensemble de la journée
Périmètre des chaînes étudiées : TF1 - France 2 - France 3- France 5 - M6 - Arte - D8 - W9 - TMC - NT1 - NRJ12 - France 4 – Gulli
Au regard de cette offre, quelles sont les chaînes sur lesquelles on regarde les documentaires ? On remarquera que l’effet offre fonctionne, puisque Arte et France 5 tirent leur épingle du jeu. On note cependant que certaines chaînes atteignent, sur les documentaires, une part d’audience moyenne très supérieure à leur offre. C’est le cas notamment de TF1 et de M6 qui comptent pour 6,2% de l’offre totale de documentaires à la télévision et réalisent 35,9 % de l’audience globale des documentaires.
Répartition par chaînes de l’offre et de la consommation de documentaires par chaînes
Les standards du documentaire font toujours recette
Si l’on se penche sur le palmarès des 5 meilleurs diffusions depuis 2008, force est de constater que le public reste attaché aux standards du documentaire historique, en étanchant sa soif de mémoire avec « Apocalypse » et « 14-18, le bruit et la fureur », ou sa soif d’évasion avec « Retour en Terre Inconnue ». Ce palmarès met également en évidence l’évolution du genre documentaire - qui reprend notamment des codes de la télé-réalité - et même si de prime abord on se focalise sur l’amour et ses méandres, le pré et tout ce qui va autour, la région, le métier, en sont le décor.
Palmarès des cinq meilleurs documentaires de 2008 à 2012
Nonobstant si l’on revient aux « fondamentaux » du documentaire qui représente plus de 54% de l’offre totale, les chaînes font reposer près des trois quarts de leur offre sur trois genres que sont :
- Le documentaire géographique, avec près de 29% de l’offre ;
- Le documentaire animalier (plus de 25%) ;
- Le documentaire historique (19,2%).
En lien avec l’offre, ces trois genres agrègent les trois quarts de l’audience. Remarquons la bonne performance du documentaire historique dont la part de consommation est supérieure à sa part d’offre.
Offre et consommation par genre de documentaires
Hors documentaires sur la vie quotidienne ou vie pratique
Le public des documentaires, c’est le public de la télévision
Peu de genres de programmes ont un profil aussi comparable à celui du média : un public âgé en moyenne de 50,6 ans pour le documentaire contre 49,3 ans pour le média télévision. À peine plus féminin que la moyenne (57,4 % vs 55,6 %), il est aussi un peu plus CSP+ (1) que l’ensemble des téléspectateurs (19,7 % vs 18,7 %).
Comparaison du profil du téléspectateur de documentaires et du téléspectateur moyen
Le documentaire est un genre de programme qui rassemble un large public : plus de 66% des personnes, soit près de 40 millions, regardent au moins une fois par semaine un documentaire. Il dispose pourtant de moins de notoriété qu’un film de cinéma avant sa diffusion à la télévision, n’étant pas le centre de la conversation sociale, ni le rituel que sont les journaux télévisés, le documentaire est, de fait, plus concurrencé. Reste que, dès lors qu’il reprend les codes qui en ont fait l’ADN de la télévision, ou qu’il les réinvente - en devenant par exemple un rendez-vous - il se hisse au niveau des meilleures diffusions télévisuelles : les 10 meilleures diffusions de documentaires atteignent souvent plus de 6 millions de téléspectateurs.
Jean-Pierre Panzani, Directeur Marketing et Développement du Département Télévision de Médiamétrie
Source : Médiamétrie – Médiamat
1 Les CSP+ regroupent les cadres, les professions intellectuelles supérieures, les professions intermédiaires, les artisans et commerçants. Les CSP- regroupent les agriculteurs, les employés, les ouvriers.
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